Voilà un
réel progrès!
Au premier abord, Ann Hibard et Marielle Vaillancourt,
deux artistes du Centre Wellington, semblent aussi différentes
l’une de l’autre que le jour et la nuit. Ann
est passionnée d’aliments naturels et de médecine
douce, alors que Marielle excelle en mathématiques
et en informatique. Mais elles ont en commun la douleur de
la maladie mentale et une détermination à lutter
contre la stigmatisation.
Elles se côtoient à l’Atelier de cartes
du Centre Wellington où elles créent, à la
main, de splendides cartes de souhaits et leur travail attire
de plus en plus d’acheteurs. Plus de vingt mille personnes
du monde des affaires, de la politique et du grand public
ont déjà reçu et apprécié les
créations de l’atelier.
Combattre les tabous
«
Il y a quelque temps, le Centre culturel de Verdun nous a
invitées à exposer notre travail avec d’autres
artistes locaux. Nous avons exposé nos œuvres
aux bibliothèques de Verdun et de l’Île-des-Sœurs »,
raconte Marielle avec fierté. « Personne du
public ne savait lesquels des exposants vivaient avec une
maladie mentale.
Mieux encore, ce n’est pas nous qui
les avons approchés, mais eux qui nous ont demandé d’intégrer
nos œuvres à ces expositions. Voilà un
réel progrès! » Marielle et Ann sont
très fière de la présence grandissante
du Centre Wellington dans la communauté artistique.
À la conquête de la timidité
Ann reconnaît avoir été très timide
au début. « Comme je souffre de dépression
et d’anxiété, je me sens facilement dépassée
par les événements et mon anxiété peut
me dérouter un peu. Mais lorsque je vais à l’atelier,
tout le monde est chaleureux et encourageant – en particulier
Brenda Nixon, qui coordonne l’atelier.
Je me plonge à tel
point dans ce que je peins que mon monologue intérieur
se calme et que la journée passe en un éclair.
Ensuite, ajoute-t-elle, nous vendons nos cartes à la
Boutique Uniquement Vôtre, et lors de ventes de cartes
organisées tout au long de l’année à l’Hôpital
et dans la communauté. »
Des gribouillages? Certainement pas!
«
J’adore aider lors des ventes de cartes, poursuit Ann.
C’est une excellente façon de contrer la stigmatisation.
Nos clients sont vraiment impressionnés. Il y en a
qui arrivent avec l’impression que les personnes qui
ont une maladie mentale ne peuvent que gribouiller ou jeter
des couleurs sur une toile. Ces journées de vente
nous offrent l’occasion de montrer que nous sommes
des artistes à part entière. »
Impolitesse au restaurant
Lorsqu’on lui parle de stigmatisation, Anna nous confie
: « J’ai 63 ans et j’ai vu beaucoup de
discrimination dans ma vie. J’ai été dans
certains restaurants où des personnes atteintes de
maladie mentale dînaient tranquillement à leur
table, mais où d’autres clients les regardaient
fixement, comme pour tenter de leur faire sentir qu’elles
n’étaient pas au bon endroit.
Une journée,
j’ai même entendu un homme dire: « Oh!
On ne devrait pas laisser ces gens-là entrer ici pendant
notre repas. » Lorsque j’ai entendu cela, je
me suis levée de ma table et j’ai été me
joindre aux personnes souffrant de maladie mentale. Il me
fallait montrer au client qu’il était cruel
et il fallait surtout que je lui montre qu’il avait
tort. »
Face à face
Marielle Vaillancourt, qui possède un baccalauréat
en mathématiques et une maîtrise en informatique,
a aussi ressenti le poids de la discrimination. Ayant connu
quelques revers importants, elle est devenue dépressive
et a connu des troubles de concentration et de graves problèmes
de mémoire. Elle a tenté de continuer à travailler,
mais avec de plus en plus de difficulté. Mais comme
ses problèmes de sommeil, de concentration et de mémoire
s’aggravaient, elle a perdu son emploi.
«
Un jour, je me suis retrouvée face à face avec
une ex-collègue. Elle a fait semblant de ne pas me
voir et m’a croisée rapidement, les yeux fixés
au sol, comme si j’avais été invisible.
J'aurais voulu qu’elle me dise bonjour et ne soit pas
aussi mal à l’aise en ma présence. J’ai
toujours été une battante. Comme je ne pouvais
plus occuper mon emploi, je me suis mise à développer
mon côté artistique à l’Atelier
des cartes. » Marielle aime aussi vendre ses cartes
: « Notre clientèle est souvent surprise que
des gens atteints de maladie mentale puissent produire des
oeuvres de ce calibre. »
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